Qu’est ce que le carnet d’ordre ou "order book" pour les anglophones ? C’est
l’endroit où tous les ordres des acheteurs et des vendeurs sont confrontés. Enfin presque.
Car nous allons voir que le carnet d’ordre ne reflète pas toujours l’exacte réalité...
Définition du carnet d’ordre
Pour une valeur donnée, tous les ordres de bourse, d’achat et de vente, de tous les courtiers, sont centralisés par l’organisateur du marché,
en un seul et même endroit : le Carnet d’Ordre Central. La confrontation des offres et des demandes s’exerce en temps réel et de façon permanente,
aux heures où les places de marchés sont ouvertes. Cette confrontation s’effectue dans le respect des règles de priorité portant à la fois sur
la chronologie de production des ordres sur le marché et sur leur prix.
Voici la définition très théorique d’un carnet d’ordre. Si vous n’avez rien compris, c’est normal, passons à la pratique !
Comment lire un carnet d’ordre
Pour bien comprendre comment fonctionne un carnet d’ordre, rien de mieux qu’un exemple concret.
Un carnet est composé de 6 colonnes :
- 3 concernent les acheteurs, à gauche. C’est le côté du carnet qu’on appelle le bid, c’est-à-dire "l’offre"
- 3 concernent les vendeurs, à droite. C’est le côté du carnet qu’on appelle l’ask, c’est-à-dire la "demande"
Lecture du 1er niveau : l’information la plus utile
Lisons la première ligne, ou plutôt le "1er niveau" dans le jargon boursier :
- Il y a 7 acheteurs qui sont prêts à acheter au total, 5 152 actions CGG, et ce au prix de 4.217 EUR. C’est la meilleure offre
- En face, il y a 4 vendeurs qui sont prêts à vendre au total 2 954 actions, et ce aux prix de 4.225 EUR
Une subtilité : quand on dit qu’il y a 7 acheteurs, ce n’est pas tout à fait vrai. Pour être tout à fait correct, il y a 7 ordres. Ces 7 ordres ont très bien pu être passés par un seul et même acheteur. C’est rare, mais c’est possible, surtout si le carnet est manipulé, ce qui est, en théorie, formellement interdit.
Le spread ou la fourchette de cotation
On constate que sur ce premier niveau, on trouve les meilleurs acheteurs et les meilleurs vendeurs. Autrement dit les acheteurs qui sont prêts à
acheter le plus cher et les vendeurs qui sont prêts à vendre le moins cher.
Dans le cas présent, la meilleure offre est donc à 4.217 EUR et la meilleure demande est à 4.225 EUR : la différence de prix qui séparent les
deux meilleures propositions est donc de 0.008 EUR. C’est ce qu’on appelle le spread, alias la "fourchette de prix". Il est souvent exprimé en
pourcentage de la meilleure offre, dans le cas présent, le spread de CGG est donc de 0.008 / 4.225 = 0.19 %
Le spread traduit le niveau d’accord entre acheteurs et vendeurs. Plus le spread est élevé, plus le marché est nerveux, donc attention...
Le pas de cotation
Le pas de cotation correspond à la précision avec laquelle le prix de l’action est donné. Dans notre exemple, il est de 0.001 EUR. 3 chiffres après la virgule Quel intérêt d’avoir une telle précision ? En théorie, plus la précision est élevée, plus le spread est faible et donc plus il y a de chances qu’un acheteur et un vendeur se mettent d’accord sur un prix et réalisent une transaction. Ce pas de cotation dépend surtout du prix du sous jacent traité. Une action qui cote 1 000 EUR aura un pas de cotation de 0.01 EUR alors qu’une penny stock cotant 1 EUR bénéficiera sans doute d’un pas de cotation de 0.0001 EUR, ce afin d’éviter des variations brutales du cours.
Lecture des niveaux inférieurs : la profondeur du carnet
Les lignes suivantes sur le carnet correspondent aux niveau 2, 3 etc.
En général, votre broker n’affichera que les 7 premiers niveaux. C’est ce qu’on appelle la profondeur affichée du carnet. Mais vous ne
voyez que la partie immergée de l’iceberg ! Car la profondeur réelle, est bien plus élevée ! Seulement les investisseurs particuliers
n’y ont pas accès...
Il faut savoir qu’à l’ouverture des marchés, la profondeur réelle du carnet d’ordre est en général deux fois moins élevée que sa moyenne
en journée : ce qui signifie que les ordres n’affluent pas vraiment et que les investisseurs attendent de voir comme va se comporter le
titre à l’ouverture pour se positionner.
3 vérités que vous devriez connaître
Voici trois faits stylisés sur les carnets d’ordre que peu de gens connaissent mais qui sont pourtant bien réels.
"Les carnets d’ordre ne sont pas complets"
Comme nous l’avons vu, en tant que particulier vous n’avez accès qu’aux premières strates du carnet d’ordre. Donc vous ne disposez pas du même niveau d’information que certains brokers par exemple, qui ont une vision beaucoup plus profonde. Mais la non exhaustivité du carnet qui vous est présenté ne tient pas uniquement à cette profondeur tronquée : certains n’apparaissent tout simplement pas ou partiellement.
"Tous les ordres ne sont pas visibles"
Il y a tout d’abord ce qu’on appelle les transactions hors carnet, dites Over The Counter. Ce sont des transactions de gré à gré
qui ne transitent pas par le système de centralisation des ordres. Pourquoi ? Parce qu’elles sont généralement beaucoup trop grosses
et pourraient semer la panique chez les investisseurs. Donc elles prennent une voie secondaire.
Mais surtout, peu de gens connaissance l’existence des "ordres iceberg". Pour reprendre notre exemple, vous pensez qu’il y a 2 954 actions à vendre
à 4.225 EUR d’après le carnet présenté. En réalité, il y en a peut être bien plus ! Seule une analyse conjointe des transactions et du comportement
du carnet vous permettra de le découvrir, mais c’est un autre sujet qui est d’ailleurs abordé dans l’article traitant des différens types
d’ordre en bourse.
"Les carnet d’ordres sont manipulés"
Beaucoup de petits investisseurs pensent pouvoir tirer de l’information utile à partir de la simple observation des carnets d’ordres et notamment des forces en présence. D’autres investisseurs plus gros le savent pertinemment et pipent les dés en appuyant plus ou moins sur le côté vendeur ou sur le côté acheteur. Si je veux acheter des actions CGG à bas prix, je peux par exemple placer un gros ordre de vente de 20 000 actions à 4.224 EUR pour faire paniquer la foule. Certains vont se mettre à vendre à prix bradé, et je suis en face pour récupérer les actions. Une fois que je suis servi, j’annule mon gros ordre de vente, et je fais l’inverse à l’achat pour créer une spéculation haussière et revendre mes actions. Ce genre de comportement est interdit par l’AMF. Mais il existe. Et l’AMF ne peut pas tout surveiller et encore moins tout sanctionner. Attention donc aux lectures rapides des carnets !
Comment trader au carnet d’ordre
Certains tradeurs expérimentés pratiquent le trading au carnet ou du moins essaient encore de le pratiquer car si cette technique a
effectivement fait ses preuves il y a plusieurs années, elle est aujourd’hui très compliquée à mettre en oeuvre, du moins pour un humain.
Le trading au carnet consiste à observer simultanément le carnet d’ordre et les transactions, afin de comprendre qui fait le marché. Est ce qu’il y a un
gros qui cherche à larguer beaucoup d’actions ou au contraire est ce qu’un gros est en train de secouer le carnet pour ramasser des titres à bon
compte ? Avant l’apparition du trading haute fréquence (HFT), il était possible de "lire" un carnet d’ordre de façon assez simple sans trop se
tromper. Aujourd’hui, c’es beaucoup plus compliqué. En revanche, de nombreux algorithmes de trading haute fréquence utilisent effectivement
toutes les informations à leur disposition, dont l’évolution du carnet d’ordre, pour extraire de l’information cachée, détecter et anticiper
certains micro mouvements.
Comprendre comment fonctionne un carnet d’ordre est préférable pour investir en bourse. Si les informations qu’il contient peuvent être utiles dans le cadre d’un trading dynamique à haute fréquence, elles sont de plus en plus difficiles à extraire et nécessitent des algorithmes de trading spécialisés. Leur pouvoir prédictif se limitant bien souvent à de l’intraday, notre approche ne se base pas sur l’exploitation de ces données. Nous exploitons d’autres types d’informations qui nous permettent de réaliser des prévisions sur des horizons jusqu’à 20 jours.